jeudi 16 octobre 2014

Le premier été - Anne Percin

Un roman bouleversant et sensible sur le thème de l’adolescence et des premiers amours. 
"Tous les crève-cœurs de l'enfance sont des douleurs saignantes qui se referment et laissent des cicatrices. La sagesse n'est rien d'autre qu'un réseau de stigmates"

C'est la fin de l’été. Deux sœurs se retrouvent en Haute-Saône afin de vider la maison de leurs grands-parents, décédés. Catherine, la benjamine devenue une libraire solitaire, n’a plus mis les pieds dans cette maison depuis 15 ans. Angélique, quant à elle, s’est mariée et a fondé une famille. 

Alors que Catherine entre dans le village, les souvenirs de l’été de ses seize ans ressurgissent, implacables. Et ce secret douloureux, cette culpabilité qu'elle garde au plus profond d'elle-même la hante plus que jamais. Elle décide alors de raconter à sa sœur ce qui la ronge depuis cet été là, le dernier qu’elles aient passé ensemble.

Cette année là, les jeunes passent doucement de l'enfance à l'adolescence. Des groupes se forment, des amitiés se créent. Il y a la colo, les heures passées à la piscine ou dans le jardin, les booms et les premiers amours. Et tandis que sa soeur flirte avec un garçon de la colo, Catherine rencontre un jeune homme du village, différent des autres et d'une incroyable beauté. C'est alors que nait un désir qu'elle aura beaucoup de mal à comprendre...


Difficile de trouver les mots justes pour résumer ce livre tant il m'a retournée. J'ai fini cette lecture la gorge nouée.

Petit roman de seulement 181 pages, il semble parler de vacances d'été et de premiers amours d’adolescentes. Et pourtant... Pourtant le sujet est bien plus profond, plus dur, plus cruel. 

Dès le départ, on sait qu'il s'est déroulé un drame, mais ce n'est qu'au fil des pages, alors que la tension monte incontestablement, que l'on comprend l'origine de ce drame et l'impact de certains événements, de certaines paroles.

"Ce n'est pas une tombe. Pas plus que ne le sont, sur le bord des nationales, les silhouettes noires découpées dans le métal, sur les sites des accidents meurtriers. C'est vide, ça ne contient rien, ça ne protège rien. C'est juste un lieu, une borne, un espace délimité pour fixer le souvenir du drame..."

Avec beaucoup de sensualité - une sensualité parfois sauvage -, Anne Percin nous raconte, à travers la confession de Catherine, la découverte du corps, du désir et du plaisir.  

"La vraie découverte, ce n’est pas le sexe de l’autre, c’est le sien. (...) C’est comme découvrir une nouvelle pièce dans la maison où on habite depuis toujours."
"C'est la violence partout, quoi que je fasse, où que je me tourne. La brutalité du corps et des sens qui m'a jetée dans ses bras, à sa tête, entre ses mains, contre ses jambes, sur son ventre (...)"

Mais elle décrit également l'innocence de certains personnages opposée à la cruauté des autres envers la différence.

J'attendais la sortie de ce roman en poche depuis de longs mois, et je n'ai pas été déçue. C'est un roman puissant, intense. Je resterai marquée par cette lecture.

"Et la honte dominait tout, écrasait tout. Une honte générale qui me faisait haïr aussi bien les autres que moi-même, et lui pour couronner le tout. Je portais cette honte comme une marque sur la peau, un tatouage. Qu'elle fut invisible aux yeux des autres était à peine une consolation. J'aurais voulu détruire tout ce qui s'était passé, le piétiner, arracher ce souvenir gluant qui me collait à la peau - mais le faire non pas avec le froid calcul de l'amnésie volontaire, mais à grands coups d'ongles (...)"

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